Education : quand les arrêtés bloquent le système

A cause d’un vice dans deux arrêtés portant nomination des délégués départementaux dans la région de l’Ouest, la passation de service reste bloquée, ce qui n’est pas sans incidence sur le bon fonctionnement du service, à une période cruciale comme celle de la rentrée scolaire.

L’un des problèmes du système éducatif au Cameroun, est la frustration que vivent les personnels d’encadrement dans les ministères et dans les services déconcentrés. En ce début d’année scolaire 2022 2023, alors que la grogne des enseignements n’a pas encore trouvé une issue, la région de l’Ouest, plus spécifiquement les départements des Hauts –Plateaux, de la Mifi et du Ndé, connaissent un blocage au niveau des délégations départementales du ministère des Enseignement secondaires. Tout part de l’arrêté ministériel numéro 393/22/Minesec du 12 septembre 2022 portant nomination des responsables dans les services déconcentrés du ministère des Enseignements secondaires, signé par la ministre Pauline Nalova Lyonga. Un jeu de chaises est opéré, au terme de cet arrêté, entre 3 départements sur les 8 que compte la Région. Djampou Serges, précédemment délégué départemental Minesec pour le Ndé à Bangangté est nommé délégué départemental dans la Mifi à Bafoussam, en remplacement de Chouloh Chantal. A la délégation départementale des Hauts-Plateaux à Baham est nommé Nchousekeu André précédemment en service à la délégation départementale du Noun, en remplacement de Kamkoum Théodore. Ce dernier est à son tour nommé dans le Ndé comme délégué départemental, avec la précision qu’il était précédemment délégué départemental Minesec des Hauts Plateaux à Baham. Le 13 septembre 2022, au lendemain de la signature de l’arrêté ministériel, le délégué régional du ministère des Enseignements secondaires pour l’Ouest Ngabnya François prend le relais et programme la passation de service pour le 15 septembre à Baham, le 16 septembre à Bangangté dans la matinée et à Bafoussam dans l’après-midi. Quelques heures après, il revient sur ce calendrier en publiant un autre, dans lequel Bangangté n’est plus programmé. Quelques heures encore après, et dans la même journée, un message whatsapp est envoyé à toutes les parties prenantes avec la teneur suivante « Chers collègues toutes passations de service des DDES initialement prévus pour cette semaine sont annulées jusqu’à nouvel ordre. Instruction de la très haute hiérarchie. » Le message qui circule en mode transféré n’est pas signé, mais tout porte à croire que l’auteur serait le même délégué régional, sinon une autre autorité au-dessus de lui en mesure de s’adresser au personnel des délégations avec le vocable « collègues», toujours est-il que tout s’est arrêté là.

Le jeu de chaises se serait passé sans heurt, si le metteur en scène n’avait pas sorti du chapeau un quatrième personnage, qui avait pourtant quitté la scène il y a un an. Son apparition spectaculaire, même si elle donne au théâtre son effet magique, est venue gripper le déroulement normal de la pièce. Le réalisateur, qui est le délégué régional, est alors resté figé devant la scène, se demandant s’il ne faut pas éteindre la lumière pour redistribuer les rôles.

Blocage

Nalova Lyonga, Minesec: qu’est ce qui s’est passé?

A l’origine du blocage, un vice dans l’arrêté ministériel du 12 septembre 2022, concernant les Hauts-Plateaux. Le titulaire à date du poste dans ce département est plutôt le nommé Siegni Claude, suivant l’arrête ministériel du 31 août 2021. Il y avait été nommé en remplacement Kamkoum Théodore, frappé dit-on à l’époque d’une maladie qui l’avait contraint à abandonner le poste. Siegni Claude, en service à la même délégation, avait assuré les fonctions par intérim pendant un temps avant d’être confirmé au poste. Mais l’arrêté du 12 septembre 2022 l’a simplement ignoré en indiquant que Kamkoum Théodore nommé dans le Ndé était précédemment en poste dans les Hauts-Plateaux, alors que celui-ci n’occupe plus la fonction. La question est alors de savoir si la passation de service à Baham se fera entre le nouveau nommé Nchousekeu André et Kamkoum Théodore ou Siegni Claude. La passation de service étant donc bloquée dans les Hauts-Plateaux, elle touche par effet de transitivité le Ndé et la Mifi. Le délégué du Ndé Djampou Serges qui devait être remplacé par celui venant des Hauts- Plateaux est encore en poste, puisqu’on ne sait pas qui de Siegni Claude ou de Kamkoum Théodore va le remplacer. A Bafoussam, Chouloh Chantal, qui avait déjà fait ses bagages, s’est rassise sur la chaise, en attendant Djampou Serges qui doit venir de Bangangté. On est là face à une pièce de théâtre qui tarde à connaître un dénouement : le metteur en scène est Nalova Lyonga Pauline, ministre des Enseignements secondaires, les personnages étant les trois délégués départementaux. Le jeu de chaises se serait passé sans heurt, si le metteur en scène n’avait pas sorti du chapeau un quatrième personnage, qui avait pourtant quitté la scène il y a un an. Son apparition spectaculaire, même si elle donne au théâtre son effet magique, est venue gripper le déroulement normal de la pièce. Le réalisateur, qui est le délégué régional, est alors resté figé devant la scène, se demandant s’il ne faut pas éteindre la lumière pour redistribuer les rôles.

Impact

Et comme dans toute représentation théâtrale inachevée, il y a en a qui doivent payer le prix. Dans le cas d’espèce c’est l’éducation. Dans les couloirs des différentes délégations concernées, sous les apparences de sérénité se cachent en réalité un malaise. Les collaborateurs, sans le montrer, boudent les occupants des lieux qui devraient déjà être partis. Ces derniers à leur tour ne peuvent efficacement interpeller ni leurs proches collaborateurs, ni les chefs d’établissements, au risque de se heurter à l’interrogation de savoir à quel titre ils agissent. Au mieux ils se limitent à gérer les affaires courantes et faire le ménage autour d’eux, au propre comme au figuré, car administrativement ils ne peuvent plus signer aucun document ni prendre un acte qui engage ces différentes délégations. Ces conditions favorisent la cour du roi Pétaud, et dans un secteur aussi sensible que celui de l’éducation, on en arrive à un tel blocage doublé de cacophonie à une rentrée scolaire, à cause de ce qui est appelé dans le milieu la guerre des réseaux. Comment en effet Nalova Lyonga a-t-elle pu signer l’arrêté du 12 septembre 2022 comme si celui du 31 août 2021 n’existait pas, comment un délégué remplacé depuis un an, réapparait sur l’échiquier comme s’il était toujours en fonction depuis tout ce temps ? Et depuis que l’erreur a été détectée, si elle en était une, est-ce si difficile de rapporter l’arrêté, dans un milieu éducatif où l’on enseigne que reconnaître ses erreurs est un signe de grandeur !

Roland TSAPI

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